Droit des étrangers : travailler en France

Le principe général du droit au travail pour les étrangers

En France, tous les étrangers ne peuvent pas travailler librement. À la différence des citoyens français, un ressortissant d’un pays tiers doit en principe disposer à la fois d’un droit au séjour et d’une autorisation de travail pour exercer une activité salariée. Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et le code du travail encadrent ces autorisations. Dans la pratique, l’autorisation de travail prend souvent la forme d’un visa long séjour valant titre de séjour ou d’une carte de séjour portant une mention liée à l’activité professionnelle. Dans certains cas, elle reste un document distinct délivré après instruction d’un dossier par l’administration.

Pour qu’une autorisation soit accordée, plusieurs critères sont pris en compte. L’étranger doit détenir un titre de séjour ou un visa l’autorisant à demander une autorisation de travail. L’emploi proposé doit respecter le droit du travail français, en particulier le salaire au moins égal au Smic ou au salaire minimum conventionnel, la durée du travail, les conditions de logement lorsque l’employeur le fournit et l’égalité de traitement avec les salariés français. L’administration apprécie aussi l’adéquation entre les qualifications du candidat et le poste, et la situation de l’emploi dans la profession et la zone géographique, sauf lorsque cette condition n’est pas opposable pour certaines catégories de titres comme le passeport talent.

Citoyens de l’Union européenne, de l’EEE et de la Suisse

Les citoyens des États membres de l’Union européenne, de l’Espace économique européen et de la Suisse bénéficient de la liberté de circulation. Ils peuvent entrer en France sans visa, y résider et y travailler sans avoir besoin d’un titre de séjour ni d’une autorisation de travail. La seule présentation d’un passeport ou d’une carte nationale d’identité en cours de validité suffit à justifier de leur droit au séjour et au travail. Ils peuvent toutefois demander un titre de séjour facultatif s’ils souhaitent formaliser leur situation, par exemple pour faciliter certaines démarches administratives.

Les membres de famille qui sont eux-mêmes citoyens de l’Union ou de l’EEE bénéficient des mêmes droits. Les ressortissants de pays tiers membres de famille d’un citoyen de l’Union peuvent, sous conditions, obtenir un titre de séjour de membre de famille qui ouvre également un droit au travail. Depuis le retrait du Royaume Uni de l’Union européenne, les ressortissants britanniques qui s’installent en France sont soumis aux règles applicables aux étrangers non européens, sauf s’ils relèvent du régime particulier prévu par l’accord de retrait en raison d’une installation antérieure.

Autorisation de travail pour les ressortissants non européens

Pour un ressortissant d’un pays tiers, la règle est qu’il ne peut pas être recruté sans autorisation de travail. Lorsque la personne réside encore à l’étranger, l’employeur doit engager une procédure d’introduction. La demande se fait aujourd’hui de manière dématérialisée, via le portail dédié aux autorisations de travail. L’administration vérifie la conformité du contrat proposé, le respect des conditions d’emploi, l’adéquation de la qualification et, lorsque la situation de l’emploi est opposable, l’absence de candidats disponibles en France sur le poste concerné. Une fois la demande acceptée, le futur salarié sollicite auprès du consulat de France un visa de long séjour valant titre de séjour qui lui permettra de venir travailler.

Lorsque l’étranger se trouve déjà en France avec un titre de séjour qui ne lui permet pas de travailler comme salarié, il doit demander un changement de statut auprès de la préfecture, par exemple pour passer d’un statut étudiant à un statut salarié. L’employeur remplit un formulaire de demande d’autorisation de travail et fournit les justificatifs requis. Si la demande est acceptée, le titre de séjour est modifié et porte désormais la mention salarié, travailleur temporaire ou une autre mention permettant l’exercice d’une activité professionnelle. La demande de renouvellement doit être anticipée, et déposée en général dans les deux ou trois mois précédant l’expiration du titre, via la plateforme numérique ou en préfecture selon les cas.

Les principaux titres de séjour ouvrant droit au travail

En 2025, plusieurs catégories de titres de séjour permettent de travailler en France. La carte de résident, valable dix ans et renouvelable, autorise son titulaire à exercer l’activité professionnelle de son choix. La carte de séjour temporaire portant la mention salarié est délivrée pour l’exercice d’une activité salariée sous contrat à durée indéterminée. La mention travailleur temporaire concerne les contrats à durée déterminée de plus de trois mois. La carte travailleur saisonnier permet d’exercer des activités saisonnières dans la limite de plusieurs mois par an. La carte vie privée et familiale, délivrée à certaines personnes ayant des attaches familiales fortes en France, ouvre également un droit au travail sans demande supplémentaire d’autorisation.

Il existe aussi des titres pluriannuels, en particulier le passeport talent, destiné aux cadres hautement qualifiés, aux chercheurs, à certains créateurs d’entreprise, artistes ou salariés en mission, ainsi que la carte bleue européenne pour les travailleurs très qualifiés remplissant des conditions de salaire et de qualification. Ces cartes, valables jusqu’à quatre ans, valent autorisation de travail pour l’activité qui a justifié leur délivrance. Les étudiants peuvent travailler dans la limite d’un pourcentage de la durée annuelle légale, à condition de respecter ce plafond. Certains titres plus spécifiques existent encore, comme les autorisations provisoires de travail pour certaines catégories particulières ou les certificats de résidence pour les ressortissants algériens, qui reprennent dans une convention bilatérale des règles proches du droit commun.

Contrôles, numérique et difficultés pratiques

Depuis plusieurs années, les démarches des étrangers pour obtenir ou renouveler un titre de séjour se font de plus en plus en ligne, via l’Administration numérique pour les étrangers en France. Cette dématérialisation vise à simplifier les procédures mais génère aussi des difficultés pour de nombreux usagers, en particulier lorsque la plateforme connaît des dysfonctionnements. Des retards dans la délivrance ou le renouvellement des titres peuvent placer temporairement des personnes en situation irrégulière et compliquer leur accès à l’emploi, même lorsqu’elles remplissent les conditions pour travailler. Les employeurs hésitent parfois à recruter sur la base de documents provisoires méconnus, ce qui renforce l’insécurité administrative de certains travailleurs étrangers.

Malgré ces difficultés, la règle demeure que l’employeur doit vérifier l’existence et la validité du titre de séjour et, le cas échéant, de l’autorisation de travail avant l’embauche. Cette vérification doit être faite au plus tard au moment de la signature du contrat et renouvelée en cas de changement de titre. L’employeur peut, pour se sécuriser, interroger l’administration sur la validité du titre présenté dans le cadre de la procédure de déclaration préalable à l’embauche.

Sanctions pour travail sans autorisation

Employer un étranger dépourvu de titre l’autorisant à travailler constitue une infraction de travail illégal. Le code du travail prévoit des sanctions pénales pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et trente mille euros d’amende par salarié concerné, avec des peines renforcées lorsque l’infraction est commise en bande organisée. Des sanctions complémentaires peuvent être prononcées, telles que l’interdiction d’exercer, l’exclusion des marchés publics, la fermeture administrative d’un établissement ou la confiscation de certains biens. Les personnes morales encourent des amendes plus élevées et des peines spécifiques. Parallèlement à ces sanctions pénales, l’administration peut infliger une contribution spéciale de plusieurs milliers d’euros par travailleur irrégulier et une amende administrative importante en cas de récidive.

Le travailleur étranger qui présente de fausses pièces ou qui ment sciemment pour obtenir un titre de travail s’expose lui aussi à des poursuites pour fraude, passibles de peines d’amende et, dans certains cas, d’emprisonnement. Il risque également le retrait de son titre de séjour et une mesure d’éloignement. C’est pourquoi il est essentiel, pour l’employeur comme pour le salarié, de respecter les procédures d’autorisation de travail et de se faire conseiller en cas de doute, par exemple auprès de France Travail, d’un syndicat, d’une association spécialisée ou d’un avocat en droit des étrangers et du travail.